Comment prioriser les fonctionnalités dans un backlog MVP ?

Un produit numérique concentre souvent beaucoup plus de fonctionnalités que nécessaire.


Plusieurs analyses reprenant les travaux du Standish Group montrent qu’environ 20 % des fonctionnalités sont utilisées régulièrement, tandis qu’environ 50 à 60 % le sont rarement ou jamais.

Dans le même temps, une étude CB Insights sur plus de 100 post-mortems de start-up conclut que 42 % des échecs sont liés à l’absence de besoin marché réel (“no market need”).

Ces deux constats conduisent à une question centrale : comment décider de ce qui doit vraiment entrer dans le périmètre d’un MVP, et de ce qui doit attendre ?

backlog-mvp

I) Ce que l’on entend par MVP

Le concept de Minimum Viable Product vient du Lean Startup.
Eric Ries le définit comme « la version d’un nouveau produit qui permet à une équipe de collecter le maximum d’apprentissage validé sur les clients avec le minimum d’effort ».

On peut en retenir trois caractéristiques :
Minimum : le produit ne contient que les fonctionnalités nécessaires pour tester un cas d’usage précis.

Viable : il doit être suffisamment stable et utile pour que des utilisateurs acceptent de l’utiliser réellement.

Product : ce n’est pas seulement une maquette ou un POC interne ; il est exposé à un vrai marché

Le backlog MVP est donc un extrait ciblé du backlog produit : la liste des fonctionnalités strictement nécessaires pour apprendre vite, sans attendre une version “complète”.

QU’EST-CE QUE LE MVP ?

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II) Poser le cadre avant de prioriser

La priorisation est beaucoup plus simple lorsque le cadre est explicite. Avant de trier le backlog, il est utile de répondre collectivement à quatre questions.

1) Objectif du MVP

Quel est l’objectif principal de ce MVP, côté business ?

Tester un nouveau canal de vente ?

Digitaliser un processus interne ?

Valider une nouvelle offre avant de la déployer plus largement ?

Cet objectif doit être formulé en une phrase simple, partageable telle quelle avec les équipes.

2) Segment d’utilisateurs ciblé

À qui s’adresse le MVP au départ ?

– Un seul persona (par exemple : responsables RH dans les ETI)
– Un type d’utilisateur interne (par exemple : équipes support, commerciaux, conseillers…)

Plus le segment est clair, plus il est facile de juger si une fonctionnalité est prioritaire ou non.

3) Hypothèses à tester

Quelles idées souhaite-t-on confirmer ou infirmer ?

Exemples :

– Les utilisateurs acceptent de réaliser eux-mêmes une action aujourd’hui gérée au téléphone.
-Les équipes internes peuvent traiter un dossier de bout en bout dans l’outil sans repasser par Excel.

Chaque hypothèse doit pouvoir être reliée à une ou plusieurs fonctionnalités concrètes.

4) Indicateurs de succès

Comment saura-t-on que le MVP va dans la bonne direction ?

– nombre de comptes créés,
– taux d’activation sur une action clé,
– nombre de transactions,
– temps moyen de traitement d’un dossier, etc.

Une fonctionnalité qui ne contribue ni aux hypothèses, ni aux indicateurs définis mérite rarement d’entrer dans le périmètre MVP.

III) Construire un backlog “brut” avant de couper

La phase suivante consiste à collecter toutes les idées de fonctionnalités, sans encore juger si elles feront partie du MVP.

Les sources habituelles :
– ateliers avec les équipes métier, produit, IT, support,
– retours clients existants,
– analyse d’outils comparables,
– irritants internes récurrents.

Pour préparer la priorisation, il est utile de classer chaque idée dans l’une des trois familles suivantes. Cette première organisation ne remplace pas la priorisation, mais elle évite de tout mettre au même niveau.

Cœur de valeur

Fonctions directement liées à la promesse du produit : ce pour quoi un utilisateur accepterait d’essayer le service.

Support

Fonctions qui permettent au produit de fonctionner correctement (authentification, gestion basique des droits, paiement simple, notifications minimales…).

Confort

Fonctions qui améliorent l’expérience, mais ne conditionnent pas la capacité à tester le marché (tableaux de bord avancés, personnalisation poussée, automatisations secondaires, etc.).

IV) Utiliser MoSCoW pour hiérarchiser

Pour trier ce backlog brut, la méthode MoSCoW reste une approche simple et robuste. Elle provient des travaux autour de DSDM (Dynamic Systems Development Method) et est largement utilisée en gestion de produits. Chaque fonctionnalité est classée dans une des quatre catégories (voir schéma).

Deux points sont importants :

Tout ne peut pas être “Must” : si plus de la moitié du backlog est classé en Must, il devient difficile de réduire le délai de mise sur le marché.
Les “Won’t have” doivent être explicites : les écrire noir sur blanc limite les discussions répétées sur les mêmes sujets.
Schématisation de la technique MoSCow
Schématisation de la technique MoSCow

V) Croiser valeur et effort

MoSCoW gagne en efficacité lorsqu’on ajoute une estimation d’effort et de valeur métier.

Pour chaque fonctionnalité, l’équipe évalue :
– la valeur pour l’objectif du MVP (faible / moyenne / forte),
– l’effort nécessaire (faible / moyen / élevé).

On obtient alors une matrice simple :

01

Valeur forte / effort faible

candidats naturels pour le MVP.

02

Valeur forte / effort élevé

à découper, ou à conserver en Should si la capacité le permet.

03

Valeur faible

généralement positionnés en Could ou Won’t pour le MVP.

Cette logique rejoint un résultat souvent cité d’une étude de McKinsey : un produit lancé avec six mois de retard peut perdre environ un tiers de ses profits attendus sur sa période de vie. Limiter le périmètre aux fonctionnalités à plus forte valeur aide à réduire ce risque.

VI) Vérifier que le backlog est bien « minimum » et « viable »

Une fois les fonctionnalités classées, il reste à vérifier que le backlog retenu répond vraiment aux standards d’un MVP.

Trois questions structurent ce contrôle. Si l’une de ces réponses est négative, il vaut mieux ajuster l’objectif ou le périmètre plutôt que d’empiler des fonctionnalités sans cohérence.

VII) Installer un rythme de révision continue

Le backlog MVP n’est pas figé. Dès que la première version est en ligne, les données d’usage et les retours utilisateurs doivent alimenter une boucle simple :

Observer ce que font réellement les utilisateurs.

Identifier les irritants, les comportements inattendus, les abandons.

Formuler de nouvelles hypothèses et ajuster la priorisation.


Planifier les évolutions dans une roadmap courte (quelques semaines à quelques mois).

On revient ainsi à la logique du cycle Construire – Mesurer – Apprendre au cœur du Lean Startup : chaque incrément du produit est l’occasion de prendre une décision éclairée sur la suite.

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Pour conclure

Prioriser un backlog MVP revient à :
– clarifier l’objectif, les utilisateurs ciblés et les hypothèses à tester,
– lister toutes les idées de fonctionnalités,
– distinguer ce qui relève du cœur de valeur, du support et du confort,
– classer les éléments avec MoSCoW, en croisant valeur métier et effort,
– vérifier que le périmètre reste à la fois minimum et viable,
– réviser régulièrement à partir des données et des retours terrain.

Cette discipline permet de sortir des arbitrages purement intuitifs, et de concentrer l’investissement sur ce qui apporte effectivement de la valeur.

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